Naissance et filiation
Sri Atmananda est issu d’une illustre famille matriarcale du nom de Nair venant de Cherukulam dans le village de Peringara à Tiruvalla Taluk dans le centre de Travancore. Il est né dans les dernières heures du vendredi 23 de Karttika en l’an 1059 M.E. (correspondant au samedi 8 décembre 1883 – le jour est compté à partir du lever du soleil en Inde, pas à partir de minuit comme à l’étranger), son étoile natale étant Pururuttati.
Son père était Brahmashri Govindan Nambudiri, un brahmane védique de l’influent Muvidattu Matham et un descendant de l’oligarchie brahmane « Pattillam » de Tiruvalla. Le père enseignait les Védas aux enfants brahmanes de la localité. Sri Krishna Menon avait plusieurs oncles, un frère et deux sœurs qui étaient tous des poètes et des érudits. Son enfance était calme et heureuse. Il manifesta cependant, depuis son enfance même, des symptômes instinctifs de religiosité profonde et d’intériorité. Il avait une aversion particulière pour la nourriture, jusqu’à ce qu’il ait environ dix ans.
À l’âge de dix ans, un grand et réputé sannyasin qui visitait Tiruvalla l’a rencontré dans sa maison et lui a donné un mantropadesha à titre d’initiation préliminaire.
Il a été scolarisé très jeune et, à l’âge de douze ans, il entra au lycée. Ses parents, ses aînés, ses voisins et ses enseignants ont tous noté la capacité d’études du garçon, son honnêteté exemplaire et son audace. Il a commencé à écrire de la poésie à l’âge de quatorze ans et a rapidement éclipsé ses oncles et son frère. Il a grandi, est devenu un athlète aux prouesses inhabituelles et certains de ses exploits physiques ont surpris même les troupes de cirque professionnelles de son temps. La natation était sa récréation préférée.
Une fois alors qu’il était adolescent, il fut le seul survivant d’un naufrage lors d’un orage à minuit dans les dangereux backwaters de Quilon, juste au-dessus de leur jonction avec la mer. Les onze autres passagers se sont noyés. La providence semble avoir été très clémente en l’épargnant pour la mission qu’il devait accomplir plus tard dans la vie.
Éducation
Son parcours scolaire a été exemplaire. Il était le premier de sa classe dans toutes les matières et était aimé à la fois par ses professeurs et par ses compagnons. Très souvent, il aidait nombre de ses camarades de classe, notamment en Malayalam en lequel il était déjà poète et littérateur. La clarté, la précision et la concision étaient les qualités dans lesquelles il excellait depuis son enfance. Il finissait de répondre à ses tests bien avant l’heure fixée et s’en est toujours très bien tiré. Le lecteur sera surpris d’apprendre qu’un élève aussi brillant ait échoué à l’examen d’entrée à l’université à l’âge de 14 ans. Il eut une dérogation spéciale de se présenter à l’examen, même s’il était mineur, grâce à ses professeurs. Curieusement, il a échoué en malayalam, là où il excellait habituellement. Il accepta calmement son sort. Mais un mois plus tard, il reçut un télégramme de l’Université de Madras, l’informant qu’il avait réussi et qu’il avait été placé en première classe. Des courriers ont également été adressées aux autorités du collège, avec effet rétroactif à compter de la date de réouverture du collège. L’humour de l’incident réside dans le fait qu’un simple zéro a malheureusement été omis dans la liste des notes de l’université, donc au lieu de 90%, il a été noté comme ayant 9%, il n’est pas étonnant qu’il ait échoué. L’erreur n’a été détectée qu’un mois plus tard. Il a fait fréquemment référence à ce simple incident dans ses entretiens spirituels, pour prouver le caractère déraisonnable de la causalité.
Mariage et diplômes
Après avoir réussi ses examens, il était impatient de poursuivre des études supérieures à l’université. Par le fait du système matriarcal les oncles maternels étaient les tuteurs légitimes de la famille, et ils n’étaient pas très intéressés par l’éducation de leurs neveux. Shri Atmananda n’a donc pas obtenu d’eux l’aide financière dont il avait besoin pour poursuivre ses études. Par conséquent, il a travaillé comme enseignant dans une école privée et a économisé de l’argent sur ses maigres revenus. Avec cet argent, il s’est inscrit dans un collège et a réussi son premier examen en arts. Puis, il a repris son travail d’enseignant dans les écoles et avec l’argent qu’il put économiser, il s’est présenté au B.A. en tant que candidat privé et obtenu une mention honorable.
Avant l’obtention du diplôme, il s’est marié en 1910 avec Saubhagyavati Parukkutti Amma, qui appartenait à la famille distinguée et aristocratique Nair de Kollaka Bungalow à Karunagappalli. Depuis l’âge de seize ans, son ancien enthousiasme religieux s’était apaisé et un esprit d’athéisme s’était emparé de lui. À cette époque, il était responsable d’avoir ébranlé la foi religieuse aveugle de bon nombre de ses voisins et amis bien intentionnés. Mais malgré tout cela, il a continué à observer régulièrement, les instructions simples que lui avait données le sannyasin.
Nomination au gouvernement et soif spirituelle
Après avoir obtenu son diplôme, il a accepté une nomination à la Haute Cour de Trivandrum. Parallèlement, il rejoint le Law College (fac de droit). Entre-temps, malgré le fait qu’il était physiquement plus petit que la norme policière, quelque chose en lui a si favorablement impressionné le commissaire de police qu’il a été recruté au département en tant qu’inspecteur principal. Il a quitté le cours de droit et a été inspecteur de police à divers endroits. Monter à cheval était un passe-temps agréable pour lui durant cette période. Alors qu’il était en service, il a pris quelques mois de congé d’études pour terminer le cours de droit et a obtenu son diplôme en droit (B.L.) avec distinction. Il a été immédiatement nommé inspecteur.
Les tendances athées qui étaient apparues à l’âge de seize ans ont continué leur emprise sur lui jusqu’au moment où il est entré comme inspecteur à Padmanabhapuram, l’ancienne capitale de Travancore. Puis, des questions spirituelles ont recommencé à attirer son attention sérieusement. Il a cherché des réponses dans des livres. C’était la seule voie qui lui était ouverte, mais rien ne le satisfaisait. À la suite de ses efforts, cependant, il était profondément convaincu qu’un Karana-gourou (un sage qui est prêt à conduire un aspirant au but) pourrait seul le conduire à la Vérité. Il savait également qu’il était incapable de choisir le bon gourou. Par conséquent, il a pris la décision de prier Dieu de le mettre sur le chemin de son gourou. Cette prière devenait de plus en plus profonde de jour en jour, il passa plusieurs nuits blanches remplies de larmes. Son agonie mentale était profonde. Cependant, ses fonctions officielles se sont poursuivies comme auparavant.
Dans cet état, un jour à Padmanabhapuram, il a rencontré un sannyasin avadhuta nu au bord de la route. Le sannyasin était meurtri de partout par des pierres lancées par des gamins espiègles dans la rue ; pourtant, il ne faisait que sourire. Immédiatement, Sri Krishna Menon a reconnu dans l’avadhuta le vieux sannyasin qu’il avait rencontré à l’âge de dix ans. Le svami l’embrassa et le consola et lui dit qu’un grand et vrai Mahatma le rencontrerait bientôt, pour le guider vers son but spirituel. Cela le consola, mais seulement pour un petit moment. La vieille agonie mentale est réapparue après quelques jours, et il a recommencé à prier avec un sérieux redoublé pour connaître un vrai gourou.
La rencontre du sat-gourou
Sri Krishna Menon avait développé une aversion naturelle envers les sannyasins en tant que classe sociale, car il avait découvert de ses fréquentes discussions avec eux que leur compréhension de la Vérité était faible. Enfin, un soir de l’année 1919, il rencontra par hasard, au bord de la route non loin du poste de police de Takkalai, un sannyasin vêtu d’une robe ocre et d’un gros turban bengali. Le sannyasin le regarda avec un sourire envoûtant. Le svamiji, lui fit signe de s’approcher et lui parla dans un anglais clair et exquis, comme s’il le connaissait depuis longtemps. En effet, il le connaissait, et le sannyasin seul le savait. Il a été attiré par le sannyasin dès son premier contact et a été fasciné par ses manières charmantes, sa démarche et ses conversations. Invité par lui pour une courte promenade, Shri Krishna Menon ne pouvait plus résister à la tentation de l’accompagner. Alors ils ont marché ensemble silencieusement, pendant environ un mile, jusqu’à ce qu’ils atteignent une vieille maison inoccupée à la porte ouest du fort de Padmanabhapuram.
Opposition véhémente et reddition ultime
Le soleil s’était couché, mais l’obscurité n’a pas enveloppé la terre comme d’habitude, car la lune brillante s’était levée. Dans ce clair de lune frais et doux, ils sont entrés dans la maison et se sont assis dans la pièce de devant. Une conversation franche et animée sur des sujets spirituels a commencé. Sri Krishna Menon, comme tout aspirant sincère est censé le faire, a posé de nombreuses questions qui, en toute autre circonstance, auraient semblé offenser la politesse ordinaire. Mais le svamiji – débordant d’amour et appréciant intérieurement le sérieux, la sincérité et la perspicacité de l’aspirant – a répondu aux questions de la manière la plus satisfaisante, douce et sans ostentation – couvrant même celles du mental de l’aspirant qu’il n’avait pas encore exprimé.
Bien plus que la logique inattaquable et l’applicabilité des réponses, c’est l’extrême humilité du grand svamiji qui a captivé le cœur de l’aspirant et l’a finalement asservi. L’ego étant ainsi paralysé, Shri Krishna Menon se prosterna immédiatement aux pieds du svamiji, lui lavant littéralement les pieds de ses larmes. Après quelques instants où il pouvait à peine parler, il se leva et pria pour obtenir des instructions lui permettant d’atteindre l’Ultime, s’il était considéré comme digne. Le svamiji, qui n’attendait que ce moment de véritable abandon, a répondu avec un sourire d’amour et de joie : « C’est pour cela et cela seul que j’ai fait tout le chemin depuis Calcutta. Je n’ai aucun autre intérêt pour Travancore. Je connaissais vos aspirations même à cette distance. »
(Remarque : un mot de prudence peut ne pas être déplacé ici, à propos de cet incident et d’autres incidents ultérieurs de ce type. Veuillez ne pas examiner, d’un point de vue purement mental, la possibilité ou le caractère raisonnable de ceux-ci. Il suffit de dire qu’ils sont tout à fait possibles, parfaitement raisonnables et certainement plus réels que les expériences mentales de l’état de veille. Ils apparaissent dans un état ou une position qui régit virtuellement l’état de veille de celui qui a eu la chance d’atteindre un tel état.)
Initiation et départ du gourou
Ils ont parlé dans cette pièce toute la nuit. Avant le lever du jour, toutes les instructions nécessaires à l’ensemble de la carrière spirituelle du disciple avaient été transmises par le svamiji et absorbées par le disciple. Les instructions couvraient le chemin de la dévotion au Dieu personnel Krishna (comme Atma-murti et non pas comme Bhagavata Krishna), ainsi que différentes voies de yoga comme le raja-yoga, Shiva-raja-yoga, pranava-yoga, etc. Le chemin du jnyana (suivant la méthode de perception directe – vichara-marga stricte, adoptant le processus de séparation, par opposition à la méthode de méditation adoptant le processus d’absorption).
Le svamiji a ressenti un manque d’enthousiasme de la part de son disciple pour s’engager sur les chemins de la dévotion et du yoga comme indiqué. Le svamiji a donc dit doucement : « J’apprécie votre réticence à suivre les cours préliminaires de dévotion et de yoga, et j’avoue que vous avez tout à fait raison. Pour la réalisation de la Vérité ultime, le dernier cours – à savoir le chemin de Jnyana – est le seul nécessaire. Mais je veux que vous soyez quelque chose de plus, que vous ne comprendrez que plus tard. Par conséquent, veuillez d’abord les entreprendre. Il ne vous faudra pas longtemps pour les terminer tous les deux. De toute évidence, le svamiji avait décidé de le sacrer Acarya ; et pour être un Acarya idéal, il faut être familier avec toutes les expériences complexes le long de tous les différents chemins.
Avant le lever du soleil, le svamiji se leva, satisfait de l’accomplissement de sa mission. Ce n’est qu’à ce moment que Shri Krishna Menon a pensé au départ imminent de son gourou. Le jour n’était pas venu et sa maison était un peu éloignée. Il ne lui était pas possible d’offrir à son gourou l’hospitalité de sa maison ou même une « dakshina » conventionnelle. Le svamiji a immédiatement discerné ses pensées et ses sentiments et a dit avec un sourire : « Il n’y a aucune obligation dans la spiritualité, il n’y a pas de personnalité impliquée. Suivez fidèlement mes instructions et vous atteindrez bientôt la perfection. Rien que cela, et rien d’autre, est la vraie dakshina pour le gourou. Ne vous inquiétez donc pas ». Ainsi, le svamiji a pris congé et est retourné directement à Calcutta via Nagercoil. Ce fut la première et la dernière rencontre, en chair et en os, entre le gourou et le disciple.
Une note sur Guru-svami
Le svamiji n’était pas un sannyasin ordinaire. C’était un grand yogin et un jnyanin, du nom de Yogananda, tel que le monde a rarement vu. Il était un grand érudit et maîtrisait de nombreuses langues, dont l’anglais. Il était issu d’une famille princière du Rajaputana. Il est devenu sannyasin à l’âge de douze ans et est devenu un jnyanin bien établi dans l’Absolu au début de son adolescence. Du Rajasthan, il est venu à Calcutta, où il vivait dans un petit ashram avec quatre disciples sannyasin.
C’était en 1919 que Shri Krishna Menon se languissait à Travancore de rencontrer un vrai gourou. Lorsque son agonie fut profonde, il toucha une corde sensible dans le svamiji, qui demeurait à Calcutta.
On pense que la relation gourou-disciple est prédestinée et non accidentelle. Aucun raisonnement intellectuel ne peut l’expliquer. La relation gourou-disciple est en dehors du domaine de la compréhension humaine. Sinon, comment expliquer l’expérience de Shri Atmananda lui-même ? Les affres spirituelles d’un aspirant sérieux à Travancore ont été transmis à plus de mille miles directement à Calcutta. Ils ont été reçus là par ce grand sannyasin seul, alors qu’ils n’ont pas été accueillis de tous les autres sages et yogins vivant alors dans toute l’Inde, à la fois loin et près.
Dès que le svamiji a entendu l’appel, il a dit à son principal disciple sannyasin : « Mon enfant pleure de l’aide à Travancore. Je vais là-bas pour le consoler ». En disant cela, il est parti par le prochain train, à ses frais, à Trivandrum et de là à Padmanabhapuram. Il savait très bien que Shri Krishna Menon viendrait là, et c’est ce qu’il s’est passé.
Sri Krishna Menon était le dernier disciple de Svami Yogananda. Il était également le seul disciple grihasta (chef de famille) du svamiji.
Sadhana spirituelle et réalisation
Le jour même où le svamiji l’a quitté, Shri Krishna Menon a commencé une pratique intense de ses exercices spirituels, en commençant par le chemin de la dévotion, en stricte conformité avec les instructions qui lui ont été données. Il s’éleva régulièrement dans le chemin de la dévotion jusqu’à ce qu’il prenne Radha-hridaya-bhavana (méditation sur le cœur de Radha), l’exercice le plus haut de dévotion personnelle à l’ishta-deva. Ainsi, il a traversé toutes les expériences passionnantes et enivrantes de l’amour désintéressé, culminant dans son propre samadhi. Il ne lui a pas fallu plus de six mois pour couvrir tout cela. C’est vers la fin de cette période qu’il composa son œuvre classique, Radha-madhavam, de 48 vers en malayalam. Ensuite, il traversa les plus durs des exercices yogiques, en suivant les chemins de différents yogas dans l’ordre. Au cours de ses exercices de yoga, son corps a été paralysé. Cela arrive à tous les yogins lorsqu’ils transcendent un adhara-chakra (centre énergétique) particulier. Ce n’est qu’une simple réaction yogique sur la constitution humaine tendue, et elle disparaît en temps voulu sans laisser d’effets néfastes. Mais la famille de Shri Krishna Menon était terriblement bouleversée, et ils se sont donc tournés vers toutes sortes de traitements médicaux qui ont été inutiles.
Enfin, la nouvelle parvint aux oreilles d’un grand yogin et jnyanin appelé Shri Cattampi Svamikal, alors très âgé, vivant à Trivandrum. Il a dit que ce n’était pas une maladie, qu’elle n’aurait aucun résultat indésirable et qu’aucun médicament de médecin n’aurait d’effet sur son corps qui était alors dans un état hyper-sensible. Cela faisait environ quinze jours que la maladie était devenue aiguë. Quoi qu’il en soit, Shri Svamikal a pris compassion de l’état anxieux de la famille de Shri Krishna Menon et a donc prescrit une simple préparation à base de plantes à appliquer à la plante de ses pieds. Elle a été appliquée vers 17 heures ce jour-là. En quelques minutes, il est tombé dans un sommeil inhabituellement long et profond, jusqu’à 8 heures du matin le lendemain matin. Quand il s’est réveillé, il était normal. L’application à base de plantes a été poursuivie pendant deux jours supplémentaires, comme indiqué par le svamiji.
Quelques mois plus tard, Shri Krishna Menon a rendu une visite de courtoisie à Shri Cattampi Svamikal. C’est alors que le svamiji lui révéla que ce n’était pas à sa propre instance qu’il avait administré l’antidote pour la maladie yogique, mais parce que le grand Yogananda lui-même l’avait voulu et qu’il lui avait demandé à travers la sphère subtile de le faire. Il a déclaré qu’autrement aucun homme spirituel n’interférerait jamais dans la sadhana d’un disciple d’un Karana-gourou et qu’ainsi rien de fâcheux n’arriverait jamais au sadhaka.
Quelques mois supplémentaires de pratiques yogiques intenses ont amené Shri Krishna Menon aux expériences les plus élevées dans la ligne du yoga. Il entrait en des nirvikalpa samadhis longs et profonds selon sa volonté. Mais cela ne le satisfaisait pas, car c’était limité dans le temps et causé par un effort intense. Selon lui, la Vérité est sans cause, permanente et auto-lumineuse.
Par conséquent, il devait chercher la Vérité ultime par d’autres moyens. Puis il prit régulièrement la jnyana-sadhana avec beaucoup de facilité et de courage, et a visualisé ainsi la Vérité ultime en très peu de temps.
La période de ses pratiques spirituelles, couvrant les trois voies, n’a pas duré plus de quatre ans (jusqu’en 1923 environ). Toutes les instructions nécessaires lui ont été clairement et régulièrement transmises par son Guru, apparaissant devant lui dans une vision vivante pendant sa sâdhanâ. Il lui a été donné le nom spirituel d’Atmananda par son propre gourou, et il est connu sous ce nom depuis.
Inclination pour le sannyasa et confirmation dans le grihastashrama (chef de famille)
Vers la fin de sa sadhana spirituelle, il ressentit une forte envie de prendre le sannyasa et de vivre avec son gourou pour le reste de sa vie. Avec cette idée en tête, il a pris toutes les dispositions pour se rendre à Calcutta vers la fin du mois de mai. Un congé de quelques mois a également été accordé par le Gouvernement et il eut l’intention de démissionner de son emploi vers la fin de ce congé. Il a choisi de ne pas révéler toute son intention, même à sa femme, mais a seulement dit qu’il souhaitait être avec son gourou pendant un certain temps. Avec tout son amour et son dévouement caractéristiques pour elle, elle accepta volontiers ce qu’il désirait si ardemment.
Mais Guru-svami a vu à travers tout ce plan et a constaté que cette mutation contrecarrerait son propre but. Il avait désigné son seul disciple grihasta pour une grande mission. Par conséquent, vers la fin du mois de mai, un jour avant le départ de Shri Atmananda pour Calcutta, Guru-svami est apparu devant lui dans une vision et lui a dit qu’il ne devait pas agir comme il l’avait prévu. Il devait continuer sa vie de chef de famille, protégeant le bien-être spirituel et phénoménal de sa propre femme et de ses enfants et de bien d’autres personnes à venir. Poursuivant, svamiji a déclaré : « Si vous venez, vous me manquerez. Je serai entré en mahasamadhi le 1er juin ».
La dernière partie de l’information a complètement bouleversé Shri Atmananda. La moindre allusion ou suggestion du Gourou était pour lui un ordre impératif. Immédiatement, il a annulé son congé et a attendu, espérant que la dernière partie de la révélation ne serait pas correcte. C’est ainsi que Shri Atmananda a été confirmé dans son grihastashrama. Exactement comme il le lui avait dit, le grand svamiji a quitté son corps mortel et est entré dans le mahasamadhi précisément à 9 heures du matin le 1er juin.
Les services de son épouse dévouée
Shrimati Parukkutti Amma, l’épouse de Sri Menon, était extrêmement affectueuse et dévouée envers lui. Elle était l’idéal de la féminité indienne à tous égards. Au cours des quatre longues années de sa sâdhanâ spirituelle, elle s’est consacrée à sa propre sâdhanâ rigoureuse, qui était de servir son mari de toutes les manières et lui permettre de consacrer tout son temps et son énergie à sa poursuite spirituelle.
La sâdhanâ d’Atmananda était intense, dirigée et continue. La sienne était également intense, mais multiforme et déconnectée. Elle avait pris la responsabilité de toute la maisonnée. Ils avaient déjà la chance d’avoir trois enfants, le plus jeune n’étant qu’un bébé. Elle s’occupait des besoins physiques de son mari avec une régularité et une dévotion qui ressemblaient à une horloge. Cela avait la priorité sur toutes ses tâches domestiques. Il devait rarement lui demander tout ce dont il avait besoin. Elle anticipait judicieusement tous ses besoins. Très souvent, elle devait le baigner et le nourrir de ses propres mains, comme s’il était un enfant, pendant ces périodes où il était dans le plan transcendantal et avait très peu de conscience corporelle. Même pendant les quatre courtes heures de repos que Shri Atmananda prenait au milieu de la nuit, elle ne pouvait pas toujours dormir parce que ses travaux domestiques n’étaient pas toujours terminés avant sa retraite le soir. Elle devait recommencer avant son réveil à 3 heures du matin pour la sâdhanâ du lendemain. Son service sans sommeil et sa dévotion envers lui pendant des années nous rappellent les services mythologiques de Shri Lakshmana à Shri Rama pendant quatorze ans dans la forêt sans sommeil ni repos. Cela nous rappelle également que l’idéal séculaire de la féminité indienne n’est pas encore éteint. Le mantra matrimonial des Hindous enjoint : « Tu ne te sépareras pas même après la mort ». Ce n’est pas une exagération, mais la simple vérité. Cela suggère que le mari et la femme représentent ce principe qui survit même à la mort. Ce ne peut jamais être le corps, les sens ou le mental que nous voyons se désintégrer ici devant nous. Ce ne peut être que ce principe permanent, lumineux et non dualiste chez l’homme, transcendant le corps, les sens et le mental. C’est l’Atma, la Vérité ultime qui ne connaît pas la mort. Le couple marié est prié de se positionner ainsi.
De quelle plus grande upadesha a-t-on besoin ?
La mise en œuvre pratique de ce noble idéal a été élaborée par les grandes femmes de l’Inde ancienne, par leur respect incomparable de l’idéal du pati-vratya. La mythologie regorge d’exemples des pouvoirs les plus merveilleux résultant de la douce pratique de ce merveilleux « yoga dévotionnel ». La femme, bien qu’apparemment ignorante (de la Réalité), considère son mari comme son Dieu incarné et lui donne ainsi tout son amour et sa dévotion. L’amour phénoménal n’est qu’une expression de la connaissance de l’unité, et le but de l’amour est cette unité elle-même. Cette unité a été progressivement ressentie par ces femmes en raison de leur tapasya simple mais sincère. Cette expérience leur a conféré les pouvoirs mystérieux d’Ishvara-bhava, à des degrés divers, même à leur insu ou sans leur désir. Les pouvoirs dansaient devant eux comme leurs esclaves. Même lorsque les maris n’avaient pas atteint un niveau spirituel élevé, leurs épouses par de telles tapasya sincères ont pu acquérir de nombreux pouvoirs. Mais quand une femme obtient le rare privilège de faire une telle tapasya envers le mari qui est bien établi dans la Vérité ultime, elle est en effet enviable. Ce sentiment d’unité ou d’identification avec le mari à tous les niveaux fait d’elle une partenaire légitime dans toutes ses réalisations. Il en était ainsi de l’épouse dévouée de Shri Atmananda, Shrimati Parukkutti Amma Swarupananda, qui était son nom spirituel.
Premiers disciples
Sur les cinq disciples de Swami Yogananda, Sri Atmananda (le seul disciple chef de famille) était le seul autorisé à jouer le rôle d’un Karana-gourou pour accepter les disciples et les guider. En conséquence, il a accepté ses premiers disciples au cours de la période 1923-24. Il a été inspecteur à Padmanabhapuram pendant toute la période de sa sâdhanâ spirituelle et pendant quelques années encore. Bien qu’il ne puisse pas consacrer beaucoup de temps à ses préparatifs officiels à la maison, son travail n’en a jamais souffert aucunement. Le gouvernement lui a rendu un hommage élogieux pour ses activités magistrales dans les affaires, même pendant la période de sa sâdhanâ. Cela a prouvé à l’observateur raisonnable que les devoirs phénoménaux légitimes ne sont jamais un obstacle à un aspirant spirituel sérieux.
Département de police et spiritualité
Plusieurs années plus tard (en 1949), Sir S. Radhakrishnan a interviewé Sri Atmananda, à la résidence de ce dernier, Parvati Vilasam, à Trivandrum. Au cours de cet entretien, Sir Radhakrishnan a demandé par curiosité : « Eh bien, monsieur, est-ce un fait que vous avez fait toute votre sadhana spirituelle pendant que vous étiez au service de police ? »
Sri Atmananda a répondu fermement : « Oui, c’est parfaitement vrai. Et je suis assez sérieux quand je dis que si quelqu’un me demande mon avis concernant la vocation ou la profession la plus utile à l’avancement spirituel, je recommanderais toujours la police ou l’armée. Parce qu’ils offrent le maximum d’obstacles et de tentations. Le succès obtenu dans de telles conditions est définitif et irrévocable ».
Son service et l’appréciation du gouvernement
De Padmanabhapuram, il a été transféré successivement à Trivandrum, Kottayam, Nagercoil, Chengannur, Alwaye et de nouveau à Kottayam, Trivandrum et Quilon – en tant qu’inspecteur judiciaire, inspecteur de gare, Surintendant adjoint de la police et surintendant de la police du district. Pendant plus d’un an, il a été chargé du devoir spécial de codifier et de préparer le long manuel de police de l’État. Il a pris sa retraite du service en 1939, alors qu’il était surintendant de police de district à Quilon. Il était la terreur des avocats qui s’opposaient à lui, en raison de sa maîtrise de la loi. Plusieurs chefs de gouvernement auprès desquels il a servi ont témoigné de leur haute appréciation de son intégrité, de son ingéniosité, de son intelligence, de son profond respect pour la loi et surtout de son efficacité indiscutable. Au service comme dans la vie phénoménale, il a toujours respecté le droit établi, des normes morales élevées et une justice humaine. Il a lutté obstinément contre ses propres supérieurs en service et même contre le gouvernement, pour le principe et la justice. Son retrait quelques mois avant la retraite a été précipité par une telle lutte contre le gouvernement pour les principes et la justice. Il n’a ni laissé tomber ses subordonnés égarés, ni les a laissés à la merci de ses supérieurs. Il les a toujours punis lui-même avec indulgence et en retour, ils l’aimaient sans réserve et lui obéissaient. Il n’a jamais eu recours aux services privés de ses subordonnés, sauf à des fins strictement officielles. Il avait toujours autour de lui une multitude de disciples qui attendaient de faire n’importe quel service d’amour, sans être demandé. Il aimait les avoir autour de lui et il appréciait leurs services plus que ceux de ses subordonnés officiels. Un agent de police a été très rarement vu dans sa maison, sauf lorsqu’il a apporté un message urgent du gouvernement. Il était dans son élément et sa liberté lorsqu’il était entouré de ses disciples. Même pendant de longues visites à pied sur les collines et les forêts pendant des jours ensemble, il a été suivi par des dizaines de ses disciples dévoués. Bien sûr, lorsqu’il s’est lancé dans une entreprise officielle, il a été officiellement escorté par les forces de police.
Nécessité d’un gourou
Il a affirmé avec force que nul aspirant, aussi grand soit-il, ne pourrait jamais atteindre la libération sans l’aide d’un Karana-gourou en personne. Accepter plus d’un gourou à la fois est encore plus dangereux que de n’en avoir aucun. Cela maintiendra l’aspirant épinglé au phénoménal et à l’attachement. Cette affirmation est exprimée par lui dans les termes les plus clairs, dans une lettre écrite de sa propre main en Malayalam daté du 11-10-1104 M.E. (mai 1929 après JC) de Kottayam, envoyé à l’une de ses premières disciples, Nityananda ( Ponnu, comme il l’appelait auparavant). Elle n’était alors qu’une fille de 13 ans et pratiquait déjà la sâdhanâ (dévotion à son Dieu personnel Krishna comme Atmamurti). Une réplique de la lettre est donnée au début de ce livre avec une traduction en anglais en face. [Elle est omise dans cette deuxième édition – la traduction est la même que ci-dessous.] Comme elle était à ses débuts dans sa carrière spirituelle, la lettre est habilement habillée dans un langage conçu pour faire appel à ses sentiments à cet âge et pourtant sans s’écarter du chemin de la Vérité ultime. La lettre peut être utile à certains chercheurs comme elle l’a déjà été à beaucoup d’autres :
Kottayam, 11-10-1104 (24 Mai 1929)
To Ponnu
Paix sur vous,
L’amour inconditionnel envers son propre gourou est le seul chemin vers la Vérité. Cette prema-bhakti n’est pas quelque chose qui pourrait être partagé. Aucun autre type d’amour ou de dévotion ne devrait être capable de le comparer. Un disciple ne devrait jamais se plier à deux gourous en même temps. Que le Seigneur Bhagavan qui est l’incarnation de sat-cit-ananda demeure en Ponnu pour toujours.
Avec amour et bénédictions
(signé) P. Krishna Menon
Il a soutenu que la libération est un changement de perspective : de l’erreur fondamentale de « la connaissance par la relation sujet-objet » à « la Vérité expérientielle ou la connaissance en identité ». Cette dernière n’est ni un résultat ni une évolution de la première. La première doit mourir pour que la seconde puisse naître. Au moment de la mort de la première perspective, il doit y avoir un certain agent transcendant le phénoménal, pour diriger l’attention de l’aspirant sur son propre être ou sa vraie nature. Cet agent est le gourou. Il est la Vérité ultime elle-même, bien qu’il apparaisse à l’œil nu comme une personne. Ce Karana-gourou en personne est indispensable pour la réalisation de soi, bien que dans certains cas très matures d’uttamadhikaris, le contact ne soit que pour quelques secondes, par un mot ou un toucher ou même un regard.
Activités spirituelles plus vastes et augmentation du nombre de disciples indiens
Lorsqu’il a été transféré à Kottayam en 1927, il n’avait qu’une poignée de disciples Malayali. À Kottayam, la clarté, la simplicité et la franchise de son approche de la Vérité, adoucie par son tempérament de profonde dévotion à la Vérité sans forme ou avec forme, ont attiré l’admiration d’un grand nombre de personnes, dont beaucoup ont progressivement cherché et accepté son enseignement. Leur nombre a commencé à grossir et en environ sept ans, il y en avait environ trois cents, dont beaucoup étaient des femmes. Parmi eux se trouvaient des diplômés, des avocats, des enseignants, des officiers, des propriétaires, des chefs féodaux et des hommes de professions diverses. Les disciples à cette époque lui rendaient visite périodiquement et restaient autour de lui pendant des jours et des semaines, écoutant son discours. Une fois durant l’année 1934, tard dans la nuit, il parlait en malayalam simple et chaste de la signification du concept d’Atma-murti. Certains d’entre nous – alors dans la force de notre jeunesse – se sont sentis somnolents et ont commencé à bâiller. Il a noté cela et à la fin de la conférence, il a déclaré : « d’ici quelques années, des flux de disciples étrangers de continents lointains afflueront pour m’entendre, vous aurez alors envie de m’entendre parler en malayalam. Attention donc. Ne perdez pas votre chance maintenant ». Notre expérience des années suivantes a prouvé que cet avertissement était littéralement vrai. Il n’avait pas besoin de plus de trois heures par jour pour régler de ses papiers officiels. Il avait besoin de moins de cinq heures pour sa nuit de repos. Le reste de sa journée était consacrée à parler avec les disciples sur les questions spirituelles en malayalam, axé principalement sur la vraie bhakti et le jnyana.
Bien qu’il soit lui-même un grand yogin, il n’a choisi de guider aucun de ses disciples sur la voie du yoga. Il avait cependant deux disciples qui venaient à lui en tant que yogins et qui, sous sa direction à travers le chemin du jnyana, devinrent des jnyanins parfaits. L’un d’eux, un sage avadhuta centenaire [Kumali-svami, décrit dans la section suivante], vit toujours dans les hauts plateaux de Travancore. L’autre était un maître d’école à Eraniel appelé Narayana Pillai. Après avoir écouté pendant quelques mois Shri Atmananda au cours de l’année 1922 (?), M. Narayana Pillai a un jour réussi à obtenir de lui un mantropadesha. Immédiatement, il a démissionné de son travail, a pris la robe du sannyasin qu’il a sanctifiée en la plaçant devant la photo de Shri Atmananda, et est allé directement dans l’Himalaya. Là, au pied de l’Himalaya, il a commencé sa sadhana avec tout le sérieux et la sincérité, guidé par la seule mantropadesha. Des instructions complètes de son gourou étaient disponibles dans la sphère subtile, chaque fois qu’il en avait besoin. En quelques années, il est devenu un grand jnyanin, vénéré et adoré par les sannyasins de Haridvar et Rishikesh. En 1948, il est apparu devant son Guru Shri Atmananda à Trivandrum dans la sphère subtile, a demandé la permission de quitter sa forme mortelle et est immédiatement entré en mahasamadhi à Rishikesh.
L’illumination de Kumali-svami
Un matin de 1932 à Kottayam, où Shri Atmananda était alors le surintendant adjoint de la police, il ressentit une envie inhabituelle de se rendre dans les collines orientales de Kumali dans les Hautes Chaînes. Immédiatement, il a commencé une visite d’inspection surprise des postes de police de la colline autour de Kumali. Il était déjà dans l’état semi-transcendantal. En descendant au poste de police, il vit que l’inspecteur était sorti pour sa tournée habituelle. Lui envoyant un mot pour qu’il vienne, Shri Atmananda, sans escorte d’aucune sorte, commença à gravir la colline, en réponse à l’envie qui se renforçait en lui au fur et à mesure. Là, au sommet de la colline, il a rencontré un vieux yogin avadhuta, complètement nu. Il l’attendait évidemment. En se rapprochant, il reconnut dans l’avadhuta le vieux sannyasin qui lui avait donné un mantra dans sa dixième année dans sa propre maison et qu’il avait rencontré plus tard à deux reprises. Le yogin avait atteint l’état de développement yogique le plus élevé et était continuellement immergé dans de longs et profonds nirvikalpa samadhi pendant des jours. Il avait de très brefs intervalles où il s’éveillait de cet état. Heureusement, c’était un de ces moments-là.
Dans l’état de veille, ce yogin avait des doutes en pensant qu’il n’avait pas atteint la Vérité ultime. Shri Atmananda, qui était également du même avis, a souhaité lui donner un coup de pouce. Ils ont parlé franchement et ouvertement de l’état réel du yogin dans son samadhi. Son mental était si pur et sattvique que Shri Atmananda n’a eu aucune difficulté à le convaincre de l’erreur fondamentale qu’il n’avait pas encore transcendée. Dans les minutes qui ont suivi, la Vérité ultime de sa propre nature lui a été clairement exposée, en très peu de mots. Le grand yogin a visualisé la Vérité ultime ici et maintenant, et est tombé dans un profond nirvikalpa samadhi. Cette fois, ce n’était pas son nirvikalpa samadhi habituel, où il était habitué à être le témoin du samadhi. Mais maintenant, il a même transcendé la qualité de témoin et s’est uni à la Réalité ultime elle-même. C’est la Réalisation de soi, pure et simple. Il a dû être ramené à la conscience corporelle de la part de Shri Atmananda lui-même, car il ne pouvait pas être laissé dans cet état. Sinon, il pourrait continuer indéfiniment. Le devoir officiel de Shri Atmananda l’attendait au poste de police. Ainsi contraint de retourner à l’état de veille après deux heures, le grand yogin se leva et se prosterna devant Shri Atmananda. C’était le deuxième disciple Yogin de Shri Atmananda. Nous l’appelons depuis ce jour le Kumali-svami, car nous ne lui connaissons aucun autre nom. Il savait depuis plusieurs années que Shri Atmananda devait être son Karana-gourou et attendait avec impatience cette longue opportunité souhaitée. Depuis 1930, il a utilisé ses pouvoirs yogiques pour se rendre dans la maison de Shri Atmananda à Kottayam sous une forme subtile et a gardé le contact avec les activités qui s’y déroulaient. Grâce à cette forme de contact, le svami avait étudié par cœur de nombreux vers et chansons composés par Shri Atmananda et qui étaient fréquemment chantés chez lui. Certains de ces versets ont d’ailleurs été répétés par le svami à Shri Atmananda, lors de leur rencontre au sommet de la colline. Ils se séparèrent peu de temps après le réveil du svami, et ne se retrouvèrent qu’une fois de plus dans le plan grossier. Mais le svami rencontrait occasionnellement son gourou et lui rendait hommage dans la sphère subtile. C’était plus fréquent juste avant le décès de Shri Atmananda. Bien sûr, le svami avait senti la catastrophe dès que Shri Atmananda avait pris sa dernière décision. Kumali-svami a maintenant cent ans et vit dans les forêts profondes de Kumali. Ses samskaras avadhuta étaient si profondément enracinés en lui qu’il lui était impossible de rassembler suffisamment de conscience corporelle pour mener une vie confinée dans la société.
Illumination dans sa propre maison
Il convient de mentionner que Shri Atmananda a régulièrement donné des tattvopadesha à sa propre femme et à ses enfants, à sa propre mère, sa sœur, son oncle et son beau-père, les absorbant en lui l’Ultime, ainsi que ses autres disciples.
L’avènement des disciples européens
L’afflux de ses disciples européens, bien que prédit par lui dès 1934, n’a commencé à prendre effet que vers 1937. C’est en 1937 que M. Thompson – un jeune écrivain et poète anglais de Londres, avec de très forts samskaras spirituels – est arrivé à le rencontrer. Il était depuis un certain temps avec Shri Ramana Maharshi. Après une discussion animée de quelques jours avec Shri Atmananda, il a supplié d’être accepté comme disciple régulier et d’être initié à la Vérité ultime. Mais Shri Atmananda a répondu, avec sa courtoisie habituelle, qu’il devait d’abord obtenir l’autorisation formelle du Maharshi lui-même à cette fin. M. Thompson est donc allé directement à Ramanashramam, a obtenu la permission et les bénédictions du Maharshi et est revenu à Quilon. Mais Shri Atmananda l’avait déjà su dans la sphère subtile et ainsi, sans même en demander plus à M. Thompson, l’a accepté comme disciple régulier et a poursuivi les discussions. Ce n’est que plusieurs jours plus tard que M. Thompson lui-même a rendu compte de sa dernière visite au Maharshi. M. Thompson a été le premier des disciples européens de Shri Atmananda. Il a été suivi en 1941 par Mlle Ella Maillart, journaliste et exploratrice suisse bien connue, et M. John Levy de Londres, riche aristocrate, compositeur, musicien et architecte, profondément intéressé par l’enquête sur la Vérité. Bien que juif de naissance, M. John Levy avait poussé son enquête à travers différentes confessions. Insatisfait de chacune d’elles, il a parcouru toute l’Inde, rencontrant divers chefs spirituels de renom. Enfin, Mlle Ella Maillart, suivie de M. John Levy, est venue à Shri Atmananda. L’approche rationnelle et non technique de Shri Atmananda à l’égard de la Vérité ultime et la logique simple qu’il a suivie dans ses discussions les ont vivement séduits. Ils n’ont écouté les discours que pendant quelques jours, puis ils ont constaté que leurs questions étaient toutes épuisées et qu’elles étaient intellectuellement satisfaites. Ils ont également supplié Shri Atmananda de leur montrer le chemin de la Vérité ultime et ont été acceptés comme ses disciples. Ils ont été suivis au fil du temps par beaucoup d’autres. Pour n’en citer que quelques-uns : M. Arnold Mayer et M. Robert Ceresole de Suisse, Dr Roger Godel et Alice Godel de France, Son Excellence Moyine Al Arab du Caire, M. Kamal D. Joumblatte le chef du Liban, M. Max Yergan et Dr Leena Yergan des États-Unis, et M. Freddy Guthmann et M. Leon Michel d’Argentine. Au fil du temps, les disciples et les pèlerins, certains d’entre eux des personnalités notables, sont venus de plus en plus nombreux de ces pays et de bien d’autres pays également. Il est en effet agréable de constater que près de la moitié d’entre eux étaient des femmes. Le plus grand nombre de disciples étrangers est venu d’Argentine en Amérique du Sud et le reste de France, des États-Unis d’Amérique, de Suisse et d’Angleterre, et quelques-uns venaient également d’Égypte, du Liban, d’Italie, de Grèce, d’Allemagne, des Pays-Bas, d’Israël, d’Amérique latine, etc. Beaucoup venaient de différentes régions de l’Inde, principalement de Bombay et Hyderabad, et un petit nombre de Ceylan. La plupart de ces disciples venaient de chez eux sur des continents lointains pour le rencontrer périodiquement et pour être près de lui, écoutant ses discours aussi longtemps que leur temps et leurs ressources le permettaient. Ceux des disciples qui ont été choisis par lui ont reçu le cours final de tattvopadesha régulier, lorsque toute la Vérité a été exposée par lui de manière connectée. À chaque fois, il s’adressait particulièrement à quelques disciples, qui étaient ainsi autorisés par une logique et une argumentation inattaquable à diriger entièrement leur attention sur l’être réel en eux, au-delà du corps, des sens et du mental. À ce stade, en dépit de toute leur résistance, une force mystérieuse (la force de la Vérité) émanait du Gourou et les englobait chacun dans un sentiment d’unité avec le Gourou. Cela leur a permis de se présenter consciemment comme ce principe ultime dont les caractéristiques avaient déjà été exposées dans un langage sans ambiguïté. Cette expérience non duelle de sa propre nature est appelée « réalisation » ou « visualisation » de la Vérité, ici et maintenant. Il leur a ensuite été demandé [aux disciples] de simplement s’accrocher à cette expérience et de se familiariser de plus en plus avec elle, en essayant de transcender le corps, les sens et le mental aussi souvent que possible, en expérimentant automatiquement la Vérité ultime à chaque fois. Ils l’ont fait et se sont progressivement établis dans la Vérité ultime, en réponse à leur sérieux, leur sincérité et leurs efforts.
En mars 1959, le nombre de ses disciples, indiens et étrangers, s’élevait à plusieurs centaines. Beaucoup d’autres avaient reçu une aide spirituelle importante de sa part, bien que pas sous la forme d’une relation directe gourou-disciple. Il a souvent dit : « Ne pensez pas que tous ceux qui se déplacent la plupart du temps sont mes disciples. Je n’accepte que ceux en qui je trouve la bonne attitude de soumission ou de véritable dévouement à la Vérité ». Bien sûr, les autres ont aussi certainement profité du contact, mais pas dans la mesure de la libération ultime.
Autres activités spirituelles et aversion pour la publicité
Outre le discours habituel, il accordait des interviews à de nombreux chercheurs spirituels de toutes les régions de l’Inde et de l’étranger. Le Dr et Mme Julian Huxley, Sir S. Radhakrishnan, le Dr Mukerjee, Raymond Mortimer, le célèbre critique anglais, en faisaient partie. M. Paul Brunton, qui était avec Shri Ramana Maharshi depuis longtemps, a été autorisé à écouter les discours de Shri Atmananda en tant qu’observateur pendant une période de trois mois en 1952, étant entendu que rien de direct ou indirect sur les sujets (tels que discuté par Shri Atmananda) serait publié par lui, sans l’approbation préalable de Shri Atmananda lui-même. Ce n’était qu’une précaution contre d’éventuelles fausses déclarations, car un esprit, aussi pur et bien intentionné soit-il, est incapable d’imprégner la Vérité ultime.
Shri Atmananda était par nature opposé à toute publicité, et il évitait autant que possible les publicistes et les journalistes ; car il affirmait que même les rudiments de la spiritualité et de la Vérité ne pouvaient être transmis que par contact personnel et jamais par aucun autre moyen. Par obéissance à son désir, nous nous sommes très difficilement abstenus de publier quoi que ce soit concernant sa vie et ses activités. C’était vraiment inhabituel. Très souvent, des personnes de renommée internationale sont restées à Trivandrum pendant des semaines et des mois, écoutant ses discours quotidiens. Naturellement, des hommes de presse sont venus nous voir pour obtenir des informations sur ces personnes et leurs activités. Mais nous n’avons pu leur révéler que l’identité personnelle des visiteurs et le but général de leur séjour.
La retraite du service et ses séjours à l’étranger
Après sa retraite du service gouvernemental en 1939, il commença à consacrer tout son temps à ses disciples. Il a fixé sa résidence avec sa famille dans son ancienne maison de campagne, Anandawadi, à Malakkara, près de Chengannur, sur la rive gauche de la rivière sacrée Pampa. Mais à partir de 1943, la santé de sa femme a commencé à se détériorer et il a donc déménagé sa résidence à Trivandrum, pour des raisons médicales.
En 1945, le prince au pouvoir, Raja Rameswara Rao de Vanaparti, qui était l’un de ses disciples, l’a invité avec sa famille. Il partit donc avec sa famille et quelques disciples et séjourna au palais royal de Vanaparti puis à Hyderabad pendant quelques semaines en tant qu’invité de son altesse.
À la demande de ses disciples européens, dirigés par M. John Levy de Londres, il s’envola pour l’Europe en juin 1950, en passant par Bombay et Le Caire. Il a passé une quinzaine de jours à Paris, une autre quinzaine en Suisse et une dizaine de jours en Egypte, donnant des discours spirituels presque tous les jours à des groupes de ses disciples et sélectionnant des personnes à chaque endroit. Il a discuté de la Vérité avec les visiteurs suivant des chemins différents, en termes de chemin suivi par chacun. Il n’a discrédité aucun chemin en particulier, mais a simplement souligné le mauvais accent mis dans l’application des instructions, s’il y en avait, et a conseillé à chacun de suivre son propre chemin avec une discrimination juste et un sérieux profond. De nombreux yogins et bhaktas de différentes régions de l’Inde, et certains même de l’étranger, qui avait été victime de divers maux et troubles à la suite de glissements dans ses instructions ou d’une mauvaise emphase dans ses exercices, venait souvent solliciter son aide. Il les a écoutés avec compassion et a aidé la plupart d’entre eux par une explication, une interprétation ou une correction appropriée. Il a toujours insisté sur le fait que le sol ne devrait jamais être coupé sous les pieds d’un sadhaka spirituel, sans lui donner quelque chose de mieux à la place.
Son point de vue sur les obligations sociales
Il était très attentif à suivre strictement toutes les coutumes et conventions, religieuses et sociales. Il a soutenu qu’elles jouaient un rôle très important dans le modelage du caractère et le maintien de la vie saine d’un aspirant. Tout simplement parce que nous ne comprenons pas le véritable but et la véritable signification des restrictions sociales introduites par des personnes plus sages, il est stupide et parfois même désastreux de les ignorer ou de les rejeter.
Au cours de remarques plus informelles de Shri Atmananda, il a mis en lumière plusieurs de ces coutumes qui sont malheureusement rejetées par la jeune génération. Il pourrait être intéressant de noter à cet égard la manière dont il a lui-même agi.
En 1932, sa propre mère est décédée de la manière la plus dynamique sans aucune maladie, clamant au dernier souffle : « Je suis sat-cit-ananda. Sat-cita-nanda je suis ». Après sa disparition, Shri Atmananda (bien qu’établie dans la Vérité ultime) a brûlé du camphre devant le cadavre de la mère et s’est prosterné devant lui en larmes, comme un fils dévoué. En outre, il a exécuté tous les rites, rituels et cérémonies sous les instructions du prêtre du village, en stricte conformité avec les coutumes et conventions sociales existantes.
Une fois de plus, lorsque sa propre femme est décédée en 1953, il a conseillé à ses propres enfants de pratiquer les rituels de la même manière, et il leur a enjoint de faire de même quand il quitterait son corps dans quelques années. Bien sûr, ils ont tout fait comme ordonné. Il a affirmé que tout cela était phénoménal et devait donc être guidé par des lois et des coutumes phénoménales.
Sa propre indisposition, le décès de Mère et ensuite
Le premier janvier 1952, nous avons eu des nouvelles surprenantes de vagues prémonitions d’une catastrophe imminente pour lui. Shri Atmananda a soudainement développé une grande faiblesse intérieure. Il n’y avait aucun mal physique. Cette faiblesse est devenue si alarmante, le 3 janvier 1952, qu’elle a intrigué les médecins et nous avons presque craint de l’avoir perdu. Il s’est rétabli soudainement et complètement dans la soirée du 3 janvier, mais avec une prémonition claire qu’elle se reproduirait dans deux mois. Grâce à la prémonition, les disciples, y compris sa femme et ses enfants, ont fait beaucoup pour conjurer la calamité imminente dans deux mois à venir. Exactement comme prévu, l’ennui est réapparu le 1er mars, avec des développements plus graves. Mais heureusement, le 4 mars, il nous a de nouveau été gentiment épargné.
Entre-temps, la santé de sa femme a commencé à empirer. Elle est restée au lit pendant toute une année, sous sa supervision personnelle et ses soins infirmiers. Elle a quitté paisiblement son enveloppe mortelle le 4 mars 1953, sous la main apaisante de Shri Atmananda, son gourou et son mari, et en présence de la plupart de ses enfants et de nombreux disciples dévoués de Shri Atmananda. Son corps a été incinéré dans le style hindou caractéristique, avec beaucoup de bois de santal, de camphre et d’encens, sur le terrain de sa maison de campagne à Malakkara. Les rites, rituels et cérémonies se déroulaient en stricte conformité avec la pratique sociale locale. Immédiatement après la fin de tous les rites cérémoniels, qui ont duré 12 jours, Shri Atmananda est retourné à sa résidence à Trivandrum. Après un séjour de trois semaines à Trivandrum, exécutant un programme spirituel intense, il est retourné à Malakkara la deuxième semaine d’avril. Le 41e jour après le décès de Swarupanandamba, un magnifique monument de samadhi en granit noir a été installé au cœur d’Anandawadi en présence de Shri Atmananda lui-même, et ses restes mortels ont été déposés avec les rites cérémoniels dans une voûte à l’intérieur. Après la cérémonie, il a dit à ses enfants et à ses disciples réunis autour de lui de construire une structure similaire près du sud de celle-ci, afin de préserver ses propres restes mortels lors de son décès – probablement dans six ans.
Comment il a fait face à son décès
Il pourrait être intéressant de noter la façon dont Shri Atmananda a fait face au décès de sa propre femme et la manière dont il a aidé aux rites qui ont suivi. La profondeur de leur amour et de leur respect mutuel lorsqu’ils vivaient était classique et proverbial. L’examen de sa conduite pendant les quelques jours avant et après sa disparition révélera à la fois l’homme et le sage en lui. Depuis le 4 mars 1952, il était profondément éveillé à ses besoins physiques et à ses appels, s’occupant d’elle jour et nuit, et sa propre santé en souffrait gravement. Il savait très bien qu’elle décédait et avait laissé entendre à ses proches d’être là le 4ème matin [de mars 1953]. Quand elle était sur le point de décéder, il s’est assis tout près, et l’a aidée à être tranquille et consciente de sa vraie nature – la Vérité. Au dernier moment, alors que le principe de vie était sur le point de quitter son corps, de la bonne manière yogique, il pressa son front contre le sien et l’aida à fusionner en Lui – l’Ultime. Immédiatement, il se leva, et en moins de cinq secondes sortit de la pièce, se recomposa, et annonça son décès en un mot aux disciples européens et indiens attendant anxieusement : « Terminé ». Resté seul à la tête de la famille, il a dû prendre toutes les dispositions pour la crémation et les rites. Bien sûr, il a dû suivre le corps jusqu’à Malakkara et y rester pendant environ quinze jours. Nous avons été surpris de le voir prendre personnellement toutes les dispositions nécessaires. Il emballa sa propre valise comme si de rien n’était et sans larme ni tristesse. Certains des disciples européens, qui se trouvaient être présents à l’occasion, ont remarqué que c’était parce qu’il était un Sage qu’il était si peu préoccupé par les incidents phénoménaux. La crémation a pris fin la nuit et les rituels du lendemain matin ont été achevés avant 9 heures du matin. Puis Shri Atmananda s’est reposé sur son lit entouré de ses enfants et de ses disciples, et parla de notre « mère » disparue (comme nous l’appelions autrefois). Puis il nous a parlé avec émotion visible de sa véritable noblesse et nous a raconté d’innombrables incidents d’amour et d’abnégation au cours de sa vie. Il a ensuite pleuré et versé des larmes en torrents. Les disciples et les parents ont également pleuré abondamment. Les pleurs de Shri Atmananda ne se sont pas calmés et nous avons commencé à avoir peur du tour que cela pourrait prendre ensuite.
Retenue et indulgence dans les émotions
À ce moment, Sri Kallor Narayana Pillai – un vieil ami et camarade de classe de Sri Atmananda – est venu lui présenter ses condoléances et un disciple lui a transmis le message. En moins d’une minute, Sri Atmananda a cessé de pleurer, s’est essuyé les yeux, s’est lavé le visage et est entré dans le salon. Là, les anciens amis se sont rencontrés et ont échangé quelques mots préliminaires sur la maladie et le départ de l’épouse. Il faut se rappeler que tous deux étaient des écrivains et des poètes durant leur enfance. En quelques minutes, la conversation a dérivé vers la littérature et la poésie. Un verset composé par le visiteur il y a plus de quarante ans se trouva être cité par l’auteur lui-même, mais il ne se souvenait plus de la seconde moitié. Sri Atmananda le récita aussitôt de mémoire laquelle était très limpide, et ils rirent et se réjouirent à ce sujet, comme s’ils avaient oublié qu’il s’agissait d’une visite de condoléances. Après avoir parlé pendant environ trois quarts d’heure, l’ami est parti et Sri Atmananda est retourné voir les disciples et les parents à l’intérieur. Il a repris là où il s’était arrêté et a recommencé à parler de notre mère décédée. Puis il a commencé à pleurer et à verser des larmes à profusion, comme auparavant. Cette conduite nous a d’autant plus surpris, mais nous n’avons pas osé lui demander quoi que ce soit à ce moment-là. Après quelques jours, nous lui avons demandé le sens de tout cela. Alors il a répondu calmement : « C’est le yogin dans le Un qui retient les sentiments et se maintient détendu, à force d’effort. C’est le bhakta en un qui se livre à profusion aux émotions douces, et cela aussi à force d’effort. Ce ne sont là que des expressions mentales, et donc artificielles. Celui qui se retient ne peut pas se laisser aller, et celui qui se livre ne peut pas retenir les sentiments comme il le souhaite. C’est le vrai Sage seul qui peut faire les deux à sa guise. « Il le fait, non par effort, mais spontanément. Les sentiments ne lui viennent jamais à l’improviste. S’il pense que c’est le moment d’agir avec discrétion, les sentiments se tiennent respectueusement à distance. Mais au moment où il les invite, ils se précipitent comme des torrents. Encore une fois, dès qu’il met le frein, par une simple pensée, ils disparaissent. C’est à cela que vous assistiez en moi à cette époque. « Il est faux d’attribuer sang-froid ou indulgence au Sage. Il est l’arrière-plan conscient des deux. L’élément humain en tant qu’homme apparaîtra clairement à la surface de toutes ses activités mais l’élément atmique sera encore plus clair pour les plus exigeants, derrière les activités apparentes du Sage. »
Visites des stations thermales pendant les mois chauds
Après la conclusion de la cérémonie du 41e jour, notre première préoccupation a été de lui faire récupérer sa santé déjà faible. Avec cet objectif en vue, nous lui avons suggéré de changer d’air et d’aller dans une station thermale. Nous l’avons donc emmené au cap Commorin, escorté par certains des disciples les plus proches et quelques serviteurs. En une quinzaine de jours, sa santé s’est considérablement améliorée et, encouragé par cela, nous sommes restés encore quinze jours. Il se délectait du plongeon quotidien en pleine mer et de l’atmosphère traditionnellement sattvique du cap Commorin. Par la suite, chaque année pendant la saison chaude, il est allé se recharger agréablement avec des disciples et des serviteurs choisis, parfois accompagnés de quelques proches, dans des stations thermales comme Bangalore, Varkalai et Kodaikanal, en plus du cap Commorin. De tous ces endroits, il a le plus apprécié le cap Commorin et a choisi d’y aller pendant trois étés, le dernier étant en avril 1959.
Sa vie domestique
Elle était idéale à tous égards. Depuis leur mariage en 1910 jusqu’à la mort de Mère en 1953, il n’y a même pas eu un seul cas où ils aient fait ou dit quoi que ce soit contre la volonté de l’un ou de l’autre. Le merveilleux secret de tout cela était le fait qu’il n’avait aucun désir individuel dans aucune affaire phénoménale, et en matière spirituelle, elle connaissait sa place et n’interférerait jamais. Il n’était pas nécessaire pour lui de conseiller à ses disciples comment ils devaient se conduire chez eux, parce que sa propre vie domestique était toujours un brillant exemple pour eux.
Comment il a utilisé la musique
Il aimait la musique et était lui-même musicien. Selon lui, la réalisation spirituelle était un mélange harmonieux de la tête et du cœur dans la Paix. Il a affirmé que la musique était un « moksha-kala » qui, s’il était utilisé avec une discrimination juste, mènerait doucement à la Vérité ultime. Une de ses plus proches disciples, Nityananda, qui est venue le voir en 1927 à l’âge de douze ans et qui est devenue une musicienne de renom dans sa jeunesse, a été guidée par Shri Atmananda à travers la musique dans les dernières étapes de son cours spirituel. Elle commença par chanter des chansons vantant le Seigneur Krishna – son Dieu personnel. Elle s’est développée par sa musique et son Dieu jusqu’à la Vérité ultime. Elle passe maintenant ses journées, complètement absorbée par le chant à la gloire du Guru – la Vérité ultime. Le chant de chansons dévotionnelles qui parlaient de la Vérité ultime suscitait en lui des émotions douces et sattviques de haut niveau. C’était la seule chose qu’il appréciait toujours. Nityananda, qui avait consacré sa vie au Guru (l’Ultime), a eu le privilège de chanter en sa présence pendant plus de trente ans et pendant les quinze dernières années de sa vie, elle l’a fait tous les jours. C’était la vraie sadhana qu’elle a faite pour elle-même. Il a tellement aimé ces chansons qu’elles l’ont souvent plongé dans des humeurs profondes pendant des heures. Il avait l’habitude de dire que ce n’étaient que ses propres conversations spirituelles et les quelques heures d’écoute des chants spirituels qui avaient vraiment soutenu sa vie. Sa propre maîtrise de la musique est évidente du fait qu’il lui avait lui-même enseigné plusieurs ragas rares comme Duhkha-khandara, Dvijavanti, Gopikavasant etc. (certains d’entre eux étant peu courants dans la musique karnatique moderne). Il n’avait pas fait d’étude formelle de la musique. Mais au temps de sa saguna sâdhanâ, il y a eu une période où pendant des jours et des semaines, il s’est noyé dans la musique divine venue de l’intérieur de lui-même, comme si elle venait de la flûte du Seigneur Krishna. Beaucoup de ses amis et éminents musiciens de cette période ont eu le plaisir de l’apprécier et de s’oublier durant ces moments, en écoutant Shri Atmananda. Ce flot de musique divine avait laissé en lui un samskara indélébile au point de lui permettre de donner des cours de musique à Nityananda.
Ses occupations préférées (kathakali et échecs)
L’art particulier du kathakali est un mélange harmonieux de poésie classique, de danse rythmique exquise mettant l’accent sur la manifestation des émotions et de musique indienne classique particulièrement adaptée au Kerala (et appelée le chemin sopanam de la musique). C’est le seul art qu’il apprécia tout au long de sa vie. À tel point qu’il avait l’habitude de faire jouer les drames de danse kathakali chez lui très souvent. Bien sûr, il sélectionnerait lui-même les histoires, qui seraient de grande valeur spirituelle, dévotionnelle et littéraire. Il a déploré le fait que les chanteurs professionnels de kathakali étaient, pour beaucoup, devenus prosaïques et sans émotion dans leurs performances habituelles. Cela était dû à un effort excessif et à un sous-paiement. On peut mentionner que le kathakali a été accepté comme élément permanent de ses célébrations d’anniversaire à partir de 1954.
En 1955, Sri Atmananda a demandé à Nityananda de compenser le manque de musique en chantant elle-même avec les danseurs sur la scène de kathakali pendant les scènes importantes. Bien que la musique kathakali sur scène soit considérée comme un travail exclusivement masculin, elle a volontiers entrepris la tâche. Il faut rappeler dans ce contexte que le chanteur a toujours la place d’honneur sur la scène kathakali. Elle était consciente de sa propre incompétence. Elle avait eu autrefois une expérience suprême, un « simple mot » de son gourou l’avait en un instant précipité à travers l’océan invincible du samsara « mondain » et l’avait débarquée en toute sécurité dans la Paix permanente où elle reposait. Mais ici, c’était beaucoup plus. Ce n’était pas un « simple mot » comme avant. C’était son souhait sacré et son ordre impératif. Elle n’avait qu’à commencer et ne pas s’arrêter. Elle l’a fait le jour de l’anniversaire, menant les meilleurs danseurs du Kerala sur la scène kathakali, avec son gourou assis devant elle, la libérant de toute sa timidité. Elle a fait son travail à merveille, à la plus haute approbation des danseurs et du public, et son gourou l’a bénie à profusion. Shri Atmananda a tellement apprécié la représentation qu’il a souhaité qu’elle se poursuive au cours des années suivantes. Elle a obéi et dirigé le kathakali avec ses chansons au cours des trois années suivantes, avec un succès croissant chaque année, jusqu’au dernier anniversaire le 20 novembre 1958.
Une autre récréation dans laquelle il a manifesté un grand intérêt tout au long de la vie était le jeu d’échecs, dans lequel il était le champion de son temps. Il jouait aux échecs très souvent avec deux de ses disciples, jusqu’à son indisposition vers la fin avril 1959. Il a souvent déclaré qu’il utilisait le jeu d’échecs même pour accélérer le progrès spirituel de ceux qui jouaient avec lui.
Ses habitudes et sa vie quotidienne
Même s’il avait été un athlète dans sa jeunesse, il n’a fait aucun exercice physique au cours des trente dernières années de sa vie. La pureté de son système (kaya-shuddhi) obtenue par sa sadhana yogique intense l’avait rendu immunisé à bien des égards. Son contrôle sur la respiration était si parfait que, par une simple pensée, il pouvait utiliser ce contrôle de telle manière qu’il servait le même but que l’exercice physique.
Il a été élevé dans des samskaras brahmaniques sattviques purs et a été un végétarien strict tout au long de sa vie. Il se réveillait régulièrement avant 4 heures du matin et terminait toutes ses ablutions et son bain avant le lever du jour. Sa nourriture était la nourriture végétarienne brahmane du Kerala habituelle – composée de riz, de légumes, de lait et de produits laitiers. La quantité qu’il consommait chaque jour était incroyablement petite. Considérant qu’il parlait sans cesse de 6 à 12 heures par jour et compte tenu de la carence en calories dans sa nourriture habituelle, c’était une énigme pour les médecins de comprendre comment il avait réussi à vivre. Il mâchait du tabac frais de Jaffna de la variété la plus forte disponible, à raison d’environ quatre à cinq livres par mois. Il cessait de le faire complètement, parfois pendant des jours, peut-être pour montrer qu’il n’était asservi ni par cette habitude ni par aucune autre. Il s’est mis à fumer des cigarettes douces et légèrement aromatisées quand il est allé en Europe en 1950 et a abandonné complètement cette habitude en septembre 1958. Il a insisté avec véhémence sur le fait qu’aucune trace ne devrait jamais être laissée après une activité, et l’a observé à la lettre même tout au long sa vie. Il a soutenu que toute trace laissée par une activité était la graine pernicieuse de son samskara. La procrastination lui était inconnue. Chaque fois qu’il décidait d’un programme spécifique, il était obstiné comme un enfant et ne se reposait pas jusqu’à ce qu’il soit terminé. Il a prouvé par la pratique et les préceptes de son idéal que tout le monde devrait vivre à la sueur de son front. Il a soutenu que l’attachement au corps n’était qu’un prélude à l’esclavage de l’âme.
Son indépendance et son intégrité
Depuis le décès de sa femme en 1953, bien qu’il ait continué à vivre dans la maison, Parvati Vilasam, il a été pris en charge exclusivement par ses disciples dévoués – bien sûr à ses propres frais. Il détestait avoir une obligation, financière ou autre, envers quiconque, y compris ses enfants et ses proches. À différentes occasions, les disciples – et les enfants en tant que disciples – offraient à ses pieds des cadeaux de différentes sortes. Bien sûr, il les acceptait tous avec plaisir. Mais chaque fois que quelque chose lui était offert à un titre autre que celui d’un véritable disciple, il parvenait à faire la même chose avec une générosité princière. Il a toujours été le gardien de son porte-monnaie. Sa femme s’est occupé des aspects financiers du ménage jusqu’à son décès. Après cela, il a pris l’un de ses disciples dévoués pour l’aider à gérer la maison.
Sa stricte ponctualité
Bien qu’il ait défendu la Vérité absolue au-delà du temps, il était strict et ponctuel dans toutes ses activités. Un jour, après avoir décidé d’aller avec sa famille à 8 heures du matin pour participer à une cérémonie, il est monté dans la voiture précisément à 8 heures et a attendu sa femme cinq minutes. Elle n’avait pas terminé ses travaux domestiques et voulait quelques minutes de plus. Cela a été impitoyablement refusé et elle a dû s’interrompre immédiatement, laissant ses travaux incomplets. Depuis lors, elle était toujours prête au moins quelques minutes avant lui. Une fois un invité du Maharaja de l’État au pouvoir avait fixé un rendez-vous pour interviewer Shri Atmananda à 16h30. L’invité, en raison d’un certain retard dans le palais, n’a pas pu arriver à temps. Shri Atmananda a attendu patiemment jusqu’à 17 heures, puis a annulé l’engagement et en a informé le bureau du palais. Entre-temps, l’invité était arrivé à Parvati Vilasam à 17 h 10 seulement. Il a été poliment informé que l’engagement avait été annulé après une demi-heure d’attente et qu’un nouveau rendez-vous devait être fixé pour un autre jour, si l’invité voulait le voir. L’invité est retourné au palais très déçu. Beaucoup de personnes autour étaient effrayées que Son Altesse puisse être terriblement en colère contre Shri Atmananda. Lorsque l’invité est retourné au palais déçu, son altesse a compati avec lui pour son malheur et a applaudi la manière dont Shri Atmananda a défendu la dignité de la Vérité ultime, du Vedanta et de l’État, par sa simple conduite.
Son amour de la beauté et son hospitalité
Des scènes de beauté de la nature, de majesté et de grandeur – comme de beaux paysages, des rivières majestueuses, de grandes chutes d’eau, de grandes montagnes et la mer déchaînée – le plongeaient dans une longue et profonde humeur – souvent au-delà du niveau mental. Son cœur était tendre au-delà de toute proportion, et dans la charité et l’hospitalité, il était princier. Les dévots et les sannyasins étaient toujours les bienvenus pour participer à son hospitalité. Sa femme et lui prenaient plaisir à regarder des dizaines d’enfants de moins de douze ans nourris somptueusement à son domicile lors de fréquentes occasions festives.
Sa famille
Le système matriarcal de la famille et de l’héritage prévaut toujours dans l’État du Kerala. La famille maternelle de Sri Atmananda s’est éteinte avec sa génération, comme si la nature avait répondu à une tradition qui veut que la famille d’un sage se termine avec lui.
Sri Atmananda a trois enfants, le fils aîné étant diplômé et propriétaire. La deuxième, la seule fille, était mariée à un médecin bien connu du Trivandrum Medical College. Elle est décédée à l’âge de 48 ans en mars 1962, laissant une fille unique. Le dernier fils est un homme d’affaires. Ils ont tous été mariés, avec des enfants et bien pourvus dans la vie. Ils ont également reçu des instructions régulières pour progresser spirituellement.
Son bannissement de l’institutionnalisation dans la spiritualité
Il a enjoint à ses disciples, y compris ses enfants, de continuer à vivre comme une famille homogène, sans jamais oublier que la relation spirituelle de chacun est directement liée avec son propre gourou. Il leur a interdit dans les termes les plus clairs de convertir de quelque manière que ce soit leur foyer spirituel sacré en une institution et, par conséquent, il a déclaré ouvertement son refus de désigner un successeur pour lui-même, malgré les demandes de différents milieux. Il était contre les institutions de toute nature pour le Vedanta et a longuement discuté de ses opinions au cours de ses entretiens consignés dans ce livre.
Sa correspondance et ses activités personnelles
Avec l’augmentation constante du nombre de ses disciples étrangers, sa correspondance a également augmenté proportionnellement. À partir de l’année 1949, l’auteur [de ce livre] a été personnellement chargé par Shri Atmananda lui-même d’officier comme son secrétaire privé – pour s’occuper de sa correspondance, officielle aussi bien que domestique, faire des courses et régler ses engagements. Après le décès de sa femme en 1953, l’auteur s’est vu confier la responsabilité supplémentaire de s’occuper plus étroitement de sa personne et de ses affaires personnelles.
Ses derniers jours et le mahasamadhi
Le 75e anniversaire de Shri Atmananda a été célébré par ses disciples à une échelle sans précédent et magnifique à Parvati Vilasam le 20 novembre 1958. Pendant les trois mois suivants, il a été occupé par de fréquentes discussions spirituelles et deux cours réguliers de tattvopadesha. À la fin de février 1959, la ville de Trivandrum devint étouffante et le changement vers une station thermale est devenu inévitable. Shri Atmananda a préféré aller au Cap Commorin. Nous sommes donc partis le 7 avril 1959, avec quelques-uns de ses serviteurs et les disciples les plus proches qui s’occupaient de sa personne. Nous avons atteint le Cap le soir même et il a immédiatement pris son bain en pleine mer. Plusieurs dizaines de ses disciples dévoués, y compris son fils aîné, l’ont accompagné et se sont installés de façon indépendante, dans des quartiers séparés très proches de son domicile. Il a récupéré une grande partie de sa santé et de sa vigueur perdue au cours de la semaine. Ce fut une fête spirituelle régulière pour tous les disciples, pendant plus de douze heures chaque jour, sous la forme de discours incessants, de chants spirituels et d’entretiens. Cela s’est poursuivi sans relâche jusqu’à la fin de la troisième semaine d’avril.
Le 22 avril 1959 (le jour de la mort de Mère), les faiblesses occasionnelles, qu’il avait jadis, réapparurent, et il a commencé à perdre l’appétit peu à peu. L’aide médicale n’a pas eu l’effet souhaité. Nous l’avons donc ramené à Trivandrum le 2 mai. À Trivandrum, il a reçu toute l’aide médicale disponible par des médecins experts. Sa faiblesse n’a fait que s’aggraver. Pourtant, il n’a pas abandonné son bain quotidien ni rompu sa routine avant le douzième soir. On pouvait voir qu’il s’intériorisait de plus en plus et que ses activités extérieures étaient toutes mécaniques. Sa condition physique empira le matin du 13 mai. Le soir même de cette journée, nous avons perdu tout espoir d’une aide médicale supplémentaire. Pendant la nuit du 13, Nityananda, qui était toujours à ses côtés, a chanté avec désespoir, avec la plus grande douceur de sa voix et de son dévouement, certaines des chansons et des vers qu’il aimait toujours. Sa réponse immédiate a été claire et agréable. Son visage, qui s’estompait apparemment, a commencé à rougir et à rayonner. Le corps entier est devenu rouge, même les quelques rides ont disparu, et son expression a montré une réponse emphatique et aimante aux chansons chantées. Précisément à sept heures moins dix minutes du matin du jeudi 14 mai 1959, il quitta paisiblement son enveloppe corporelle, en présence de sa famille en deuil, de ses disciples et de ses proches. Mais le rayonnement et l’éclat que le corps avait pris la veille ne le quittèrent jamais.
Ainsi, il nous a quittés physiquement et est entré dans le mahasamadhi comme il l’avait lui-même décidé et arrangé. Il nous avait donné d’innombrables indices concernant le mahasamadhi prévu ; mais nous n’avons pas réussi à les prendre avec la gravité et le sérieux qu’ils exigeaient. Il nous avait donné toutes les instructions concernant la disposition de ses restes mortels une fois entré dans le mahasamadhi. Quelques jours avant le décès de Mère en mars 1953, il nous avait promis, en sa présence, qu’il continuerait dans son corps encore six ans. Il a tenu sa promesse au pied de la lettre et nous a quittés en 1959. La nature avait adroitement fait le nécessaire pour que son départ de son propre corps paraisse naturel. Il a profité de l’occasion à temps et est décédé normalement. Comme il l’avait décidé de son vivant, son corps a été emmené dans sa maison de campagne, Anandawadi, à Malakkara, Chengannur, sur les rives de la rivière sacrée Pampa. Après tous les rites et rituels habituels prescrits, son corps a été soulevé conjointement par ses enfants et ses disciples, et placé sur le bûcher funéraire décoré. Le corps sacré a ainsi été incinéré sur un tas de bois de santal, de camphre et de bâtons d’encens, ainsi que du bois de mangue habituel. Tous les rites, cérémonies et conventions de la société étaient strictement respectés. Les restes mortels, recueillis religieusement et avec dévotion sur les cendres sacrées, ont été soigneusement conservés pendant un an, avec des rites solennels et des observances austères.
Le premier jour anniversaire (le 3 mai 1960), les restes mortels ont été dévotement déposés à l’intérieur d’une voûte, dans un beau monument de granit, construit à côté de celui de sa propre femme, à l’endroit indiqué par lui en 1953. Les deux monuments du samadhi sont désormais recouverts d’un toit ; et ils sont préservés, vénérés et adorés par ses disciples dévoués, à la fois en Inde et à l’étranger. Beaucoup d’entre eux s’y rencontrent chaque année le jour de l’anniversaire et observent solennellement la mémoire de leur vénéré Guru. Le public local coopère avec zèle dans tous ces cérémonies, le considérant autant comme sa propre préoccupation que celle des fils et des disciples de Shri Atmananda.
Perpétuation des installations de samadhi
Les enfants et les disciples de Gurunathan [Sri Atmananda] étaient désireux de perpétuer les samadhis sacrés d’une manière qui convient à un Sage. Par conséquent, avec l’aide sans réserve et la coopération des disciples dévots, ses enfants ont pu nettoyer le sol de tous ses encombrants ; afin d’assurer, pour toute la famille des disciples, un espace d’adoration aux samadhis, pour toujours. Le fils aîné, qui possède tout le domaine, s’occupe avec dévotion de la routine et de l’entretien des samadhis, au nom de la famille et de tous les disciples. En outre, la pierre de fondation a également été posée de manière très auspicieuse, à 8h30 le 26 novembre 1963 (étant le quatre-vingtième anniversaire de Sri Atmananda), pour une magnifique superstructure abritant les deux samadhis, rayonnant de leur plein éclat sattvique et apportant une consolation spirituelle, pour toute postérité.
Bibliographie
Sri Atmananda avait l’habitude d’écrire des livres depuis sa première jeunesse. De ses écrits antérieurs, le seul livre qui se trouve être publié était un roman en malayalam, appelé Taravati (réimprimé en 1958). Les manuscrits d’un autre long roman et d’un livre en vers ont été perdus. Ils ont été volés par de soi-disant amis. Le livre en vers est apparu par la suite sous forme imprimée, mais sous une forme mutilée. Ses écrits à caractère strictement spirituel commencent par le Radha-madhavam. Ceux-ci sont écrits en vers malayalam simples et élégants. Ils ont été publiés et conservés intacts. Ses livres spirituels sont un indice du développement clair, continu et progressif d’un aspirant idéal – de la dévotion, qui n’apparaît qu’en surface comme étant dans le plan de la dualité, à la réalisation et à l’établissement de la Vérité ultime.
1.Le premier de la série était le traité classique et dévotionnel appelé Radhamadhavam, déjà mentionné ci-dessus. Il a été composé en 1919, décrivant les expériences personnelles de l’auteur sur le chemin de la dévotion à son Dieu personnel, le Seigneur Krishna, sans perdre de vue la vraie nature de Dieu lui-même. Le texte a été diffusé sous forme manuscrite pendant de nombreuses années et a donc été très mutilé. Il a finalement été corrigé et approuvé par l’auteur lui-même, et publié par moi en 1958 par l’intermédiaire de S.R. presse, Trivandrum. Il s’agit d’un petit livre, de seulement 48 versets, d’une très haute littérature poétique. Chaque verset, sans exception, était le résultat spontané d’une expérience en samadhi. L’harmonie divine (grossière et subtile) qui en découle a valu au livre un lieu sacré dans des milliers de foyers hindous et même non hindous, comme texte préféré pour la bhajana et les chants du matin et du soir. Ayant jailli du samadhi, où l’expression de l’harmonie divine était parfaite, chaque verset a toutes les potentialités d’un mantra virtuel. (Plusieurs tantriques ont déjà découvert ce secret et utilisent avec succès bon nombre de ses versets dans le but d’exorciser les fantômes et les esprits.)
La profondeur de l’émotion sublime qu’elle suscite emmène le récitant sérieux au bord du phénoménal. Ce travail est d’un immense apport pour les personnes qui ont entrepris des exercices de dévotion avec la Réalité ultime comme but.
2. Le livre suivant intitulé Atmaramam (« Le jardin de fleurs d’Atma », publié en 1935 par l’auteur aux éditions Shri Rama Vilasom Press, Quilon) est une continuation de Radha-madhavam dans l’échelle du progrès spirituel. Il ne comprend que 69 versets, et bien que petit, il est plus sérieux et concis. Il n’a pas de thème continu, mais est une collection de versets individuels ou de groupes de versets composés à des moments différents à des fins différentes, tous pointant vers la Vérité ultime de différents points de vue. Certaines de ces compositions ne représentent pas sa propre voie choisie d’approche directe de la Vérité ultime. Ils ont été composés pour le bénéfice de différentes personnes suivant des chemins différents dans des ordres différents tout en pointant vers le véritable absolu.
3. Le livre suivant et le plus important est la première moitié d’Atmanandopanishad, appelé séparément Atma-darshanam – en malayalam, publié par l’auteur en 1945 aux éditions Reddiar Press, Trivandrum, et la deuxième édition publiée en 1958 par Vedanta Publishers, Trivandrum via le même éditeur. Dans ce volume, il expose la Vérité ultime dans le langage le plus simple, en utilisant uniquement la discrimination et la raison directe, et en ne s’appuyant sur rien d’autre que le Soi, le noyau le plus profond de l’être, qui est la seule chose qui ne peut jamais être niée ni même pensée être irréelle. Il expose la Vérité de divers points de vue, au cours de vingt chapitres distincts de seulement 155 versets en tout, la plupart d’entre eux étant d’une métrique la plus brève de la langue. Une étude attentive de ce livre, même par un aspirant ordinaire, lui permet d’avoir une connaissance indirecte de l’Atma, le Soi. Cette connaissance indirecte de la Vérité intensifie à son tour son sérieux et sa sincérité à connaître la Vérité directement, et le transforme ainsi en un véritable jijnyasu ou un véritable aspirant, garantissant ainsi la réalisation d’un Karana-gourou et la libération.
Un rendu anglais du livre par l’auteur lui-même, en prose, sous le même nom Atma-Darshan (traduit par « à l’ultime »), a été publié en 1946 par les disciples par le biais de Shri Vidya Samiti, Tiruvannamalai, et offert à Shri Atmananda le jour de son anniversaire le 2 décembre 1946.
4. Le prochain et le dernier de ses livres est la seconde moitié d’Atmanandopanishad, appelée séparément Atma-nirvriti. Il a été publié en malayalam en 1951 par l’auteur directement par le biais de Reddiar Press, Trivandrum. La version anglaise de l’auteur lui-même, en prose, sous le même nom Atma-Nirvriti (traduit par « liberté et bonheur dans le Soi ») a été publiée en 1952 par les éditeurs Vedanta, Trivandrum, par l’intermédiaire de la Government Central Press, Trivandrum. Au cours des vingt-trois courts chapitres de ce livre, comprenant en tout seulement 122 versets simples, il expose la même Vérité sous différents angles de vision. L’auteur lui-même dit à propos du livre : « Dans de nombreux endroits, le livre va au-delà de « Atma Darshan » et expose la Vérité à un niveau supérieur. L’étude de ce livre sera d’une grande utilité pour ceux qui ont acquis une connaissance de la Vérité de « Atma Darshan », pour rendre cette Connaissance stable et ainsi obtenir une paix durable ».
Outre ces versets, trois courts articles sont ajoutés à la fin de ce livre, sur les deux problèmes vitaux de l’homme et leur solution. Ces articles sont en eux-mêmes d’une immense aide au nouvel aspirant ; car en eux sont les besoins, le but et les moyens à adopter pour son enquête spirituelle et sont correctement analysés et clarifiés. Il s’agit de la première condition préalable à toute enquête réussie. Une traduction sanskrite par Shri Ravi Varma Thampan, des deux livres Atma darshanam et Atma-nirvriti, a également été publiée par les éditeurs Vedanta, Trivandrum, en 1955.
Le vrai monument
Un mot sur l’avenir pour mes chers co-disciples semble indispensable, simplement comme une présentation de mes humbles vues pour eux, pour ce qu’ils représentent. Un engouement pour les monuments et mémoriaux a saisi la société. Dès qu’une grande personnalité disparaît, des institutions et des structures muettes surgissent, partout dans le monde. Compte tenu des services extraordinaires de sacrifice rendus dans la sphère phénoménale par de tels héros et des nobles idéaux et principes qu’ils défendaient, ces monuments et mémoriaux, étant également phénoménaux, ont une signification et attirent l’émulation de la jeune génération vers des domaines semblables d’activité mondaine. Rien de phénoménal n’est jamais parfait, et donc le progrès est vers un idéal et l’effort est toujours une nécessité. Mais dans le cas d’un Sage comme Shri Atmananda, qui est la Vérité ultime elle-même et toujours parfaite et non une personnalité qui n’est jamais parfaite, les conditions et les termes de référence sont très différents. Aucun monument ou mémorial phénoménal ne peut représenter avec succès la Vérité qu’il était et la Vérité qu’il a vécue. Mais il n’y a qu’une seule issue. C’est créer des monuments vivants pour perpétuer sa mémoire. Il nous a souvent répété : « Je suis Atma l’indivisible. Je suis là au cœur de chacun d’entre vous, dans ma plénitude. Il suffit de le reconnaître et de ne jamais l’oublier ». Nous le reconnaissons sans aucun doute. Mais malheureusement, nous l’oublions souvent, dans les moments de faiblesse. Cela doit être surmonté par un effort acharné de notre part, pour nous souvenir aussi souvent que possible de la Vérité que nous connaissons déjà, et ainsi nous établir dans la Réalité ultime, le Guru. Ainsi nous devenons nous-mêmes parfaits. Le parfait seul peut être un monument au parfait. Alors, que chacun des vrais disciples de Shri Atmananda devienne un monument vivant du Guru comme Shri Atmananda l’était de Shri Yogananda et comme Shri Vivekananda l’était de Shri Ramakrishna. Je ne veux pas dire par là que tout le reste de lui peut être oublié. Non, pas du tout. Il a laissé un héritage sacré à l’humanité sous la forme de ses livres et de ses discours consacrant la Vérité qu’il défendait. Ces éléments doivent être préservés, dans toute leur pureté et leur grandeur immaculées. Les voies et moyens peuvent judicieusement être conçus pour atteindre cet objectif. De plus, si au moins un ou plusieurs de ses disciples dévots réussissent à s’établir dans la Vérité ultime et sont capables de vivre la Vérité comme l’a montré Shri Atmananda lui-même dans sa vie, rien d’autre ne peut être un monument plus approprié au grand gourou Shri Atmananda.
(Nitya Tripta)