a) Les chemins de la sagesse

L’homme en recherche spirituelle empruntera un chemin plutôt qu’un autre en fonction de son cheminement. On peut en observer plusieurs comme : le chemin de la dévotion, le chemin du yoga, le chemin du renoncement et le chemin de la connaissance. Contrairement aux idées reçues dans la société occidentale, pour les Hindous, tous les chemins sont bons. L’aspirant à la Vérité ne doit pas être découragé, sa sincérité le mènera progressivement à ce qu’il cherche.

• Le chemin de la dévotion.

En acceptant l’état de veille comme étant la réalité du monde, le chemin de la dévotion est un des chemins admis par nos sociétés occidentales. Le dévot s’identifie avec le corps physique et conçoit le Divin comme un être vivant avec de nombreux pouvoirs. Il médite sur lui. Il se réjouit des visions qu’il en a. Son Dieu lui procure de l’extase et une paix limitée. La forme de l’Être Divin qu’il a choisie pour être adorée est une création de son mental et le dévot lui donne les qualités qu’il aime le plus. L’objet divin, l’idole a exactement les mêmes caractéristiques qu’un objet ordinaire à la différence près que celui-ci est extrêmement glorifié.

• Le chemin du yoga.

Comme pour le dévot, pour le yogi, seul l’état de veille est réel. Le yogi travaille sur son corps et essaie de développer et d’exploiter toutes les potentialités de son esprit. Il utilise la méditation, dans le but de fusionner le méditant avec le médité. Pendant la méditation, telle qu’elle est habituellement pratiquée, l’esprit ne cesse d’objectiver si bien que la dualité entre l’être et sa pensée n’est jamais transcendée. Le yogi essaie de concentrer son mental vers un idéal ou une forme de pensée, pour jouir du bonheur. Quand le yogi commence à penser à l’impensable, son mental est projeté dans un état de néant, de vide, accompagné par un sentiment de paix et de totale satisfaction. Cet état s’appelle le Samadhi. Le yogi considère cette forme de pensée comme la réalité absolue et limite la réalité à une pensée vide. Nous verrons que la réalité est aussi bien dans le Samadhi que dans les activités de l’état de veille. L’homme commun est autant esclave du monde que le yogi peut l’être du Samadhi.
Quand le yogi cherche à contrôler sa pensée par des exercices physiques et mentaux, qui contrôle réellement son mental et son souffle ? Ce ne peut être le mental qui est en même temps le sujet et l’objet de la même activité. Cela implique l’existence d’un principe indépendant du mental. C’est l’aspect vidya de la connaissance : l’être s’identifie non plus avec son corps ou son esprit mais avec la Conscience qui est sa véritable nature. En peu de temps, le yogi comme le dévot en se concentrant raisonnablement sur leur but, récolteront le fruit de leurs efforts. Ils pourront atteindre des pouvoirs extraordinaires dans ce monde phénoménal. Si le yogi et le dévot ne sont pas influencés par ce qu’ils ont obtenu et si leurs egos n’ont pas pris de trop grandes proportions, ils se dirigeront vers l’enseignement d’un sage en réalisant que leurs méthodes n’étaient qu’une préparation à cette rencontre.

• Le chemin du renoncement.

Le renoncement, tel qu’il est compris et pratiqué, consiste à rejeter certains objets auxquels on accorde de l’intérêt. Les autres plus proches de soi et beaucoup plus appréciés, comme son propre corps, ses sens et son mental sont naturellement conservés.
Comment le sacrifice de quelques objets pourrait-il aider à se rapprocher de la sagesse ? Le but de la renonciation est incontestablement d’atteindre la Vérité. Mais il serait alors nécessaire de renoncer à tout ce qui n’est pas la Vérité, comme ce monde apparent qui n’est qu’un mélange de sujet et d’objet. De ce mélange, seul le sujet est la Vérité et tout le reste n’est qu’erreur apparaissant comme des objets, qu’ils soient grossiers ou subtils en incluant le corps, les sens et le mental. Les expériences de ce monde peuvent se réduire à « Conscience d’objets ». La Conscience étant le sujet réel et le reste des objets apparents.
Par conséquent, afin d’obtenir la Vérité (la Conscience), il suffit de renoncer à l’objet. Alors la Conscience, la Vérité ultime resplendit ainsi dans toute sa gloire. C’est une des méthodes, qui ne peut être suivie que sous les instructions d’un Karana-guru, un Maître vivant.

• Le chemin de la connaissance.

C’est la méthode que nous allons adopter ici. C’est le chemin vers lequel convergent les chemins précédents. Pour pouvoir le suivre, nous devrons nous libérer de notre erreur fondamentale qui est d’avoir l’illusion d’être ce corps, ces sens ou ce mental.
Nous comprendrons que le monde que nous percevons dépend de celui qui perçoit, que nous avons trois états (veille, rêve, et sommeil profond) et que nous sommes régis par trois impératifs : exister, comprendre et être heureux. Nous réaliserons que le mental est un manque. Nous aborderons l’idée du temps opposé à la permanence. En analysant le concept du corps et celui de l’âme, nous essayerons de nous situer entre l’intérieur et l’extérieur. Nous étudierons la connaissance de l’objet et découvrirons l’intervalle qui existe entre deux perceptions. Nous comprendrons notre esclavage et la libération à laquelle nous tendons. Nous réfléchirons sur cette erreur fondamentale qui est la source de notre illusion.
Jusqu’à maintenant, nous posions notre attention sur le monde extérieur, tout en oubliant que le sujet était aussi important. Qu’il soit le sujet d’un état de veille ou le sujet d’un état de rêve, le monde existe uniquement parce qu’il y a un sujet qui le perçoit ou qui le pense. Le monde reste toujours en parfaite symbiose avec l’être qui l’observe. Le sujet est constitué d’un corps, entouré d’un monde, supporté par le temps, l’espace et la causalité. Quand je vois la table, l’univers entier existe avec moi présent en son centre. Quand je vois un objet, je suis de la même nature que l’objet. J’existe dans un corps. En me matérialisant, je m’enlise dans un espace-temps infini. Le drame est joué… Le passé s’est concrétisé, l’espace s’est solidifié, la machine céleste est réalisée. Le futur prend la réalité de l’inconnu. Il ne reste plus qu’à le dompter et à le découvrir.
Dans le souvenir que nous avons d’un rêve ou d’un événement vécu, nous avons exactement la même trilogie. Même en imaginant que cet univers existait bien avant nous, nous sommes encore présents pour le penser. Nous expérimentons un monde d’objets que ce soit dans l’état de veille ou dans un état de rêve. Chaque objet existe, il est entouré d’un espace infini, il a une cause et un passé déterminé. Le monde ici présent ne deviendra une pensée qu’en le quittant pour se retrouver dans un autre univers, un autre état de veille. Nous pourrons alors nous en souvenir et dire : j’ai rêvé. Ainsi, ce monde que nous avions imaginé comme réel, deviendra aussitôt l’illusion d’un rêve. Mais souvenez-vous, tant que vous étiez dedans, c’était la réalité. C’est seulement quand le poisson sort de l’eau qu’il peut savoir qu’il évoluait dans ce milieu aquatique.
Pour réaliser l’illusion du monde, il faut en sortir. Quand nous sommes dans un rêve, nous sommes encore dans un état de veille. Et ce n’est que lorsque l’on change d’état, quand on se retrouve dans un autre état de veille, que le précédent devient un rêve. Cela confirme que tout notre monde repose sur l’état de veille. Cela ne peut en être autrement puisque c’est toujours celui dans lequel nous sommes quand nous pensons. Toutes nos questions, toutes nos croyances, nous les avons fondées sur ce seul et unique état.

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